Volonté

De LeFrenchMelee

Personne n’aime les corvées. Dans Super Smash Bros Melee, les corvées peuvent être les répétitions techniques ou le theorycrafting. Alors on se dit que c’est pas pour nous, ou que de toute façon on joue a l’instinct, et que c’est qu’un jeu donc autant s’amuser :))))

Premièrement, sachez que vous ne vous amuserez jamais autant que lorsque vous aurez dépassé ce stade. Il y a des gens qui sont capables d'endurer ces choses là, et ce ne sont ni des gens fondamentalement différents, ni des masochistes.

Deux choses sont importantes ici. La première c'est qu'avec un peu de bonne foi et de perspective positive, un nombre surprenant de choses peuvent devenir amusantes. Et la deuxième c'est que la volonté, c'est surestimé.

Le triangle Pensée Émotion Comportement

Selon le Stoïcisme, les emotions naîtraient d’une pensée. Le monde extérieur n’a PAS d’influence directe sur votre état émotionnel, mais il provoque des pensées, qui elles, en ont.

Les pensées, les émotions et les comportements sont en fait étroitement liés, et chacun influence les autres. Ce phénomène est aujourd’hui exploité en psychologie dans ce qu’on appelle la thérapie comportementale (ou Cognitive Behavioral Therapy en anglais), un des principaux remède a l’anxiété et la depression.

Une fois que l’emotion est là, le mouvement est enclenché pour de bon. C’est inutile d’essayer de contrôler ou de réprimer une emotion, car ça ne fait qu’aggraver la chose, soit immédiatement soit plus tard. La meilleure option serait de l'observer le temps qu'elle passe, comme un piéton regarderait passer une voiture plutôt que de se jeter dessus pour tenter de l’arrêter.

Malheureusement, si vous n'avez pas entraîné votre faculté de recul sur vous-même (via, par exemple, la méditation), ce qui arrive le plus souvent, c’est que vous allez avoir un comportement qui va dans le sens de cette émotion.

Maintenant imaginez quel genre d’émotion vous aurez si vous vous laissez porter par une pensée qui vous dit "ce truc est ennuyeux" ? Facile, pas envie de le faire. La volonté, c’est le fait de se faire violence lorsque l’on ressent ça et de forcer un comportement qui va à l'encontre de notre perspective initiale.

Seulement, plusieurs problèmes se posent:

Problème 1: La volonté est une ressource limitée

Le psychologue Roy Baumeister a découvert, lors d’une etude menée en 98, que des gens a qui l’on a fait resister à la tentation de manger du chocolat abandonnent ensuite environ deux fois plus rapidement sur un puzzle difficile et frustrant (en fait impossible a résoudre) par rapport a des gens n’ayant pas cette contrainte. Utiliser sa volonté a un coût ; vous ne pouvez pas vous faire violence indéfiniment. Et justement …

Problème 2: Vous vous faites violence

À partir de là, dès que votre volonté est faible, c’est la porte ouverte aux pensées negatives. Vous vous condamnez, vous culpabilisez.

En plus, vous savez maintenant ce qui se passe émotionnellement après ce genre de pensées. Et vous savez sûrement aussi que ce n'est pas dans ces moments-la qu’on se sent motivé à quoi que ce soit. Et d’ailleurs …

Problème 3: Si vous attendez d'être motivé en empruntant cette voie, vous pouvez attendre longtemps

Rappelez-vous la première phrase de cet article: vous ne serez jamais motivé à faire quelque chose d'ennuyeux ou de contraignant. Et si on en est là, c’est justement parce que votre pensée de base était "c’est ennuyeux". Du coup on se prend dans ce cercle d’à-coup d’effort, puis crash, puis mal-être. Ensuite votre volonté finit par se recharger, puis à-coup d’effort, etc.

Prenons plutôt la chose par le bon bout:

La pensée

Les pensées, comme le reste de ce que vous faites, sont soumises à la loi des habitudes. Plus vous pensez une pensée, plus vous l’ancrez, et plus vous l’ancrez moins vous en avez conscience. Au bout d’un certain temps, vous l'aurez tellement répétée qu’elle passera à la vitesse d’un courant électrique dans votre esprit, et vous ne vous en rendrez même plus forcément compte. C’est automatique et c’est surtout un problème si la pensée est négative (comme, "c'est ennuyeux") parce qu’elle va influencer absolument tout le reste.

La bonne nouvelle, c’est qu’en sachant ça, vous pouvez commencez à ouvrir les yeux sur ce qui se passe vraiment à ce niveau pour vous. Être capable de retranscrire votre monologue subconscient en mots, et prendre du recul dessus. Vous pouvez carrément écarter la pensée “c’est ennuyeux” avant même qu’elle ait pu avoir le moindre impact émotionnel, et agir en conséquence. Tout ça parce que vous vous êtes rendu compte de sa naissance et de l’impact qu’elle allait avoir sur vous et que ce n'était pas ce que vous vouliez.

Autre chose: vous voyez sûrement maintenant que la façon dont on réagit aux expériences extérieures est très arbitraire. Si vous changez votre façon de penser, vous pouvez changer votre perspective sur à peu près ce que vous voulez. Ça veut dire que vous pouvez trouver que le techskill est amusant et que theorycraft est merveilleux. Et LÀ vous aurez une motivation venant d'une source quasi inépuisable, contrairement à la volonté pure. La source étant l'amour du jeu et l'amour de la progression, et pas seulement la recherche intellectuelle d'un but lointain de résultats.

À noter

Une fois arrivé à ce stade, vous pouvez utiliser votre bon sens pour remettre de l’ordre dans votre esprit. Les gens négatifs, qui manquent de confiance en eux, anxieux, dépressifs, ont notamment des pensées totalement à côté de la plaque par rapport a la réalité qu’ils peuvent écarter ou remplacer par des pensées plus lucides.

Un peu comme se rendre compte au bout de 2 ans de jeu qu’on continue de faire toujours les mêmes roulades, et d’un coup le *voir* réellement, et se demander "pourquoi je fais ça déjà?".

Ça demande de la pratique. Il faut trouver la pensée en prenant du recul sur soit-même, comprendre comment elle nous influence, et rester lucide suffisamment longtemps pour changer l’habitude (et plus elle est ancrée, plus c'est difficile).

Autre solution

Maintenant on sait qu’on peut capter une pensée et prendre du recul dessus, mais il existe une autre solution: ne pas penser du tout. Ça veut dire *agir avant* de commencer a tergiverser dans sa tête des tenants et des aboutissants d’une tâche. Ça ne demande pas de réflexion de lancer une game avec un CPU lvl 1, donc n’en accordez pas. N’ayez pas cette micro-fraction d’arrêt, faites-le, sans cérémonie. Évitez la pensée purement et simplement. Une concentration bien développée permet ce genre de choses.

Encore une autre solution (mais moins pratique)

C’est de ne pas se laisser le choix de faire la chose en question, par exemple en se bloquant les autres possibilités. Le fait d'avoir des choix épuise énormément votre réserve de volonté.

C’est pour ça que beaucoup de gens n’arrivent pas à travailler chez eux[1], car jouer à des jeux en ligne devient une option beaucoup plus viable que lorsque vous êtes au bureau avec votre patron derrière l’épaule. Vous avez un choix, et celui là, c’est typiquement le genre qui est très coûteux pour votre volonté.

Enlever les choix, c’est d'ailleurs ce qu'il y a de plus efficace contre la procrastination. L’idée étant d’utiliser les moments ou vous êtes raisonnables pour gagner stratégiquement contre les moments ou vous ne le serez pas. Si vous coupez internet, ce n'est plus possible de procrastiner sur des jeux en ligne. Si vous n'achetez pas de gâteaux, ce n'est plus possible de grignoter à 2h du matin.

Il existe par exemple des boites qui s’ouvrent ou se verrouillent selon un timer que vous définissez.

Vous pouvez mettre votre smartphone à l'intérieur, qui restera bloqué tout le temps du timer. Il existe aussi des logiciels qui restreignent l’accès a une liste de sites que vous définissez.

Pour ça, soyez créatifs, et trouvez vos propres stratégies.

Notes

  1. Les gens qui y arrivent appliquent certainement une des deux choses présentées plus haut: - Avoir une perspective différente sur les choses, par exemple penser que le travail est gratifiant et que procrastiner est inutile et nocif pour leur bien-être. - Agir sans hésitation.

Voir aussi